Chèques impayés :
Les procédures judiciaires bloquées quand l’émetteur est introuvable
Le juge de référé peut ordonner le paiement en 24 heures et sans la présence de l’émetteur du chèque. Si l’adresse de l’émetteur est ancienne, erronée ou inconnue, les investigations peuvent durer des mois, voire des années. Jusqu’à 5 ans de prison ferme en cas de non-remboursement.
Nombreux sont les utilisateurs du chèque qui ne connaissent pas sa valeur juridique. Pourtant, ce moyen de paiement est régi par des dizaines d’articles de loi, au niveau du Code de commerce mais également dans le Code pénal et la réglementation bancaire, qu’il convient de connaître, surtout en ce qui concerne le traitement des chèques impayés.
A ce titre, il faut savoir que l’encaissement d’un chèque par un bénéficiaire, en agence ou par compensation, expose son émetteur à une interdiction immédiate d’émettre des chèques si la provision est absente ou insuffisante. En règle générale, la banque de l’émetteur informe sans délai Bank Al-Maghrib de l’incident de paiement, et adresse au concerné une lettre d’injonction pour lui demander de ne plus émettre, pendant une durée de dix ans, des chèques autres que ceux permettant le retrait de fonds ou ceux qui sont certifiés, et de lui restituer immédiatement ainsi qu’à tous les autres établissements bancaires les formules de chèques en sa possession. Cela dit, il arrive que des banquiers couvrent leurs clients privilégiés par plusieurs moyens (mise en garde instantanée, passage du compte en mode débiteur, rejet du chèque pour un autre motif que l’absence de provision…) afin de leur éviter l’incident de paiement.
Faites-vous payer partiellement si la provision est insuffisante
L’interdiction d’émettre des chèques cesse une fois que l’émetteur régularise sa situation (voir encadré ci-dessous). Mais s’il arrive que le concerné émette un nouveau chèque avant la régularisation, il est passible d’une peine d’emprisonnement d’un mois à deux ans et d’une amende de 1 000 à 10 000 DH, même si la provision est disponible et suffisante et que sa banque règle le montant du chèque à son porteur (les chèques sont payables même en cas d’interdiction).
S’agissant du porteur, qu’il présente le chèque directement à la banque de l’émetteur ou qu’il le verse dans son compte, il a le droit, en cas d’absence ou d’insuffisance de provision, d’exiger la délivrance immédiate d’un certificat de non-paiement précisant le motif du refus de paiement, le montant de l’impayé ou de l’insuffisance de provision. Certains banquiers souhaitant protéger leurs clients peuvent se montrer réticents à délivrer ce certificat, ou refuser d’informer le porteur qu’une provision insuffisante existe pour un paiement partiel. Il ne faut donc pas se laisser avoir et insister pour avoir ce document nécessaire au déclenchement de la procédure judiciaire de remboursement, que ce soit en cas de non-paiement total ou de règlement partiel.
Si le certificat de non-paiement est délivré au porteur du chèque impayé, la banque de l’émetteur procède automatiquement à son interdiction d’émettre de nouveaux chèques. En parallèle, le porteur a deux possibilités devant lui : opter pour la procédure judiciaire rapide en saisissant le juge de référé pour obtenir une injonction de paiement, ou alors suivre la procédure normale dite de «protêt», en déposant une plainte auprès du procureur du Roi.
Dans le premier circuit, on renonce à poursuivre l’émetteur du chèque impayé au pénal. Il ne subira donc, quel que soit le cas, aucune peine privative de liberté. Par contre, l’affaire sera jugée au civil en 24 heures, une fois le juge de référé saisi par l’avocat du porteur, et ce, sans la présence de l’émetteur du chèque. Si ce dernier ne fait pas appel dans les huit jours qui suivent, un huissier de justice se chargera d’exécuter sans délai l’injonction de paiement auprès de l’émetteur (montant du chèque majoré des intérêts légaux et les frais de justice), si son adresse est connue et valide. En cas de refus de paiement, le porteur peut solliciter une ordonnance du tribunal l’autorisant à procéder à toute saisie conservatoire contre l’émetteur. Si le paiement n’est pas effectué dans les trente jours après la saisie, le porteur peut faire procéder par un huissier, dans la semaine, à la vente des objets saisies.
Par contre, si l’émetteur du chèque impayé est introuvable, les services de police ou de la gendarmerie ouvriront une investigation pour retrouver l’émetteur, ce qui prend généralement plusieurs mois, voire des années.
Si l’émetteur fait appel du jugement en référé dans les huit jours, il devra présenter au tribunal des preuves mettant en cause la validité du chèque en question. Cette procédure peut durer de un à six mois, mais s’il s’avère pour le tribunal que l’émetteur essaie simplement de gagner du temps, son appel sera rejeté et il écopera d’une amende pouvant atteindre le montant du chèque impayé.
Peine d’emprisonnement avec sursis même si l’émetteur du chèque paie
La seconde procédure judiciaire permet au porteur du chèque impayé de poursuivre l’émetteur au pénal. Dans ce cas, un acte de protêt doit être dressé, par l’avocat du porteur, auprès du secrétariat greffe du tribunal, et déposé auprès du procureur du Roi. Il s’agit d’une plainte rédigée pour refus de paiement, accompagnée du chèque impayé et du certificat de non-paiement. Si le procureur juge la plainte recevable, il ordonne aux services de police ou de la gendarmerie l’arrestation de l’émetteur du chèque pour comparution. Dans ce cas-là également, si l’émetteur a changé de domicile ou s’il a fourni une adresse ancienne ou erronée, l’investigation peut durer longtemps.
En tout cas, une fois l’émetteur retrouvé et présenté au procureur, il est mis en détention provisoire jusqu’au règlement du montant du chèque, des intérêts légaux et des frais de justice supportés par le porteur. Et même si le règlement est effectué, le procès n’est pas fermé. Généralement, une peine d’emprisonnement avec sursis est prononcée par le tribunal, en plus d’une amende qui peut aller de 2 000 à 10 000 DH, sans être inférieure à 25% du montant de l’impayé ou de l’insuffisance de provision.
Par contre, si l’émetteur ne peut payer le montant du chèque, il écope d’une peine d’emprisonnement qui peut aller d’un à cinq ans et de l’amende précitée. Et si cette amende n’est pas payée au terme de la peine d’emprisonnement, le juge peut la rallonger de six mois supplémentaires.
Notons que le juge peut, en plus, interdire au condamné, pour une durée d’un à cinq ans, d’émettre des chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds ou ceux qui sont certifiés. Par ailleurs, le porteur peut demander devant la juridiction pénale une somme égale au montant du chèque en guise de dommages et intérêts.
Signalons enfin que des différences juridiques existent en ce qui concerne le traitement judiciaire des chèques impayés, selon qu’il s’agisse du Code de commerce ou du Code pénal, notamment au niveau de la prescription des actions en recours du porteur du chèque. Selon le premier Code, l’action en justice se prescrit par six mois à partir de l’expiration du délai de présentation du chèque à l’encaissement, soit 20 jours pour les chèques émis au Maroc et deux mois pour les chèques émis à l’étranger. Or, le Code pénal prolonge le délai de prescription des actions contre des délits à plus d’un an, et cela peut aller jusqu’à cinq, voire dix ans. L’émission d’un chèque sans provision étant considérée par le Code pénal comme un délit, surtout quand il s’agit de l’émission simultanée de plusieurs chèques sans provision que la loi considère comme un acte d’escroquerie, il restera donc au procureur de décider de la recevabilité de l’action en justice si elle est intentée au delà des six mois. Cela dit, pour ne prendre aucun risque, il vaut mieux présenter ses chèques à l’encaissement le plus tôt possible et de saisir la justice rapidement en cas d’impayés.
Procédure : Comment régulariser un incident de paiement
La loi donne le droit à l’émetteur d’un chèque retourné impayé de régulariser à tout moment sa situation auprès de la Banque centrale afin de recouvrer sa faculté d’émettre des chèques. Pour ce faire, il doit d’abord régler le chèque objet de l’incident soit directement au bénéficiaire, soit par constitution d’une provision suffisante et disponible auprès de sa banque au profit du porteur du chèque, soit par règlement au niveau du secrétariat greffe du Tribunal en cas d’engagement de la procédure de protêt. Il doit ensuite s’acquitter d’une amende fisclale auprès de l’une des perceptions de la Trésorerie générale du Royaume, égale à 5% du montant du chèque impayé s’il s’agit de la première injonction, à 10% en cas de deuxième injonction, et de 20% pour la troisième injonction.
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Conséquences d’un retour de chèque impayé
Est-ce que les ayants droit d’une personne décédée peuvent s’opposer au paiement d’un chèque émis par cette dernière ?
Ni les ayants droit ni les héritiers ne peuvent s’opposer au paiement d’un chèque pour cause de décès de l’émetteur.
En effet, le décès du tireur ou son incapacité survenant après l’émission ne touchent aucunement aux effets du chèque.
Par ailleurs, il n’est admis d’opposition au paiement du chèque qu’en cas de perte, de vol, d’utilisation frauduleuse ou de falsification du chèque, de redressement ou de liquidation judiciaire du porteur.
Quelles sont les conséquences d’un retour de chèque impayé pour défaut ou insuffisance de provision sur le titulaire du compte ?
Le retour d’un chèque impayé pour défaut ou insuffisance de provision expose son émetteur ou le tireur à plusieurs conséquences, tout d’abord :
L’interdiction de chéquier pour une durée de 10 ans, si l’incident de paiement n’est pas régularisé. C’est le banquier qui informe le titulaire du compte appelé le tireur par lettre d’injonction qu’il n’a plus le droit d’utiliser les chèques, pendant cette période de 10 ans, et l’invite également à restituer toutes les formules de chèques qui sont en sa possession.
Une autre conséquence, et c’est la plus grave, c’est que le titulaire du compte encourt le risque de poursuites pénales pour délit d’émission de chèque sans provision. Le tireur d’un chèque qui omet de maintenir ou de constituer la provision du chèque en vue de son paiement à la présentation est passible d’un emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 2 000 à 10 000 dirhams sans que cette amende puisse être inférieure à 25% du montant du chèque ou de l’insuffisance de provision.
Toutefois, le titulaire du compte peut recouvrer la faculté d’émettre des chèques en justifiant auprès de son banquier :
1 – Qu’il a réglé le montant du chèque objet de l’incident, soit en versant directement la somme au bénéficiaire, soit en constituant une provision suffisante pour couvrir le montant qu’il y a dans le chèque dans le compte bancaire en question ;
2 – Qu’il s’est acquitté de l’amende fiscale correspondante auprès d’une des perceptions de la Trésorerie générale du Royaume. Cette amende est égale à :
– 5% du montant du ou des chèques impayés faisant l’objet de la première injonction ;
– 10% du montant du ou des chèques faisant l’objet de la deuxième injonction;
– 20% du montant du ou des chèques faisant l’objet de la troisième injonction et des injonctions suivantes.
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Un chèque «accepté» c’est quoi ?
Une personne doit me régler une facture par chèque. Comme je n’ai pas confiance en elle, pour une question de provision, elle me propose, pour me rassurer et me garantir le paiement, de mentionner sur le chèque la mention «accepté». Quelle est la valeur juridique de cette formule ?
Est-ce que la banque a le droit de refuser de me certifier un chèque ?
Pour garantir le paiement d’un chèque, le code de commerce apporte un procédé légal important qui est la certification du chèque. La certification du chèque consiste dans le fait d’apposer la signature du tiré, c’est-à-dire le banquier, au recto du chèque qui fait l’objet de certification. C’est un procédé auquel vous pouvez avoir recours quand vous voulez vous assurer de l’existence de la provision, notamment la somme mentionnée sur le chèque, en exigeant au tireur, c’est-à-dire l’émetteur du chèque, de le présenter à son banquier pour certification. Une fois certifiée, la provision dont il est question reste bloquée, selon l’article 242 du code de commerce, sous la responsabilité du tiré, à votre profit jusqu’au terme du délai de présentation du chèque.
Pour éviter toute surprise désagréable, il serait également souhaitable de demander au banquier, si c’est possible, de vous assurer qu’il a effectivement procédé à la certification.
Par ailleurs, la banque ne doit pas refuser la certification d’un chèque sauf s’il y a défaut ou insuffisance de provision.
Enfin, pour ce qui est de la mention «accepté», elle n’a aucune valeur juridique, cette expression est réputée non écrite.
En revanche, je peux vous conseiller également pour garantir le paiement d’une partie ou de la totalité du chèque le procédé de «l’aval». L’article 265 du code de commerce dispose : «L’aval est donné soit sur le chèque ou sur une allonge, soit par un acte séparé indiquant le lieu où il est intervenu.
Il est exprimé par les mots «Bon pour aval» ou par toute autre forme équivalente ; il est signé par le donneur d’aval.
Il est considéré comme résultant de la seule signature du donneur d’aval apposée au recto du chèque, sauf quand il s’agit de la signature du tireur.
L’aval doit indiquer pour le compte de qui il est donné. A défaut de cette indication, il est réputé donné pour le tireur».
Enfin, celui qui a donné son aval est tenu au même titre que celui qui a émis le chèque, en l’occurrence celui avec qui vous avez l’intention de passer votre transaction.
Par ailleurs, il faut rappeler que les chèques donnés en garantie sont interdits par le code de commerce.
En effet, selon l’article 316 du code de commerce dans son alinéa 5, la personne qui accepte, en connaissance de cause, de recevoir ces chèques en guise de garantie est passible d’un emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 2 000 à 10 000 dirhams sans que cette amende puisse être inférieure à 25% du montant du chèque.
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Le chèque non encaissé sur le compte
Le tireur demeure responsable du paiement de la valeur du chèque non encaissé sur son compte, par effet de subrogation à la banque qui a reçu le chèque. Cependant il ne peut être tenu, en tant que personne physique, au paiement des intérêts qui sont prohibés entre musulmans(1).
(1) Tribunal de première instance – El Jadida / Jugement n° 2238/87 du 31 Décembre 1987
Banque : Chèque impayé – Reponsabilité de la banque (non) – Responsabilité du tireur (oui)- Intérêts entre personnes physiques musulmanes (non)
Conséquences d’un retour de chèque impayé
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Que faire en cas de perte de chéquier ?
En cas de perte de chéquier, suis-je obligé de déposer une plainte auprès de la police judiciaire pour que mon banquier puisse valablement recevoir mon opposition ?
Je voudrais tout d’abord signaler, qu’avec votre banque vous avez signé un contrat d’ouverture et de gestion d’un compte bancaire. En vertu de ce contrat, vous êtes le seul habilité à donner des ordres pour un retrait, un virement ou un transfert à effectuer sur votre compte. En retour, l’obligation d’exécuter vos ordres tant qu’ils ne sont pas contraires à la loi. Il en est ainsi pour une opposition lorsqu’on vous a volé, ou que vous avez perdu dans des circonstances indéterminées votre chéquier.
Dans cette optique, la banque doit exécuter cet ordre et prendre acte de votre opposition, sans pour autant exiger une quelconque déclaration ou plainte auprès de la police judiciaire.
D’ailleurs, si vous faites votre opposition par écrit et contre un accusé de réception, sans qu’il y ait de déclaration à la police, et que la banque passe outre et ne considère pas cette opposition, elle engagera sa responsabilité civile, et supportera tous les dommages que vous auriez subis.
Néanmoins, il est très important que vous procédiez à un dépôt de plainte ou à une déclaration auprès de la police, pour perte ou vol de votre chéquier, car les conséquences peuvent être très fâcheuses.
Selon le code de commerce marocain, vous êtes en droit de faire l’opposition au paiement de votre chèque que dans quatre cas :
– la perte ;
– le vol ;
– l’utilisation frauduleuse ;
– le redressement ou la liquidation judiciaire du bénéficiaire.
Sinon, vous vous exposez à des peines sérieuses pour opposition abusive.
L’article 330 du code de commerce dispose que «l’ordre ou l’engagement de payer donné par le biais d’un moyen de paiement est irrévocable. Il ne peut être fait opposition au paiement qu’en cas de perte ou de vol du moyen de paiement, de redressement ou de liquidation judiciaire du bénéficiaire». C’est une règle d’ordre public dans la mesure où elle garantit la sécurité juridique des transactions commerciales.
Par ailleurs, l’article 271 alinéa 2 du code de commerce dispose qu’«il n’est admis d’opposition au paiement du chèque qu’en cas de perte, de vol, d’utilisation frauduleuse ou de falsification du chèque, de redressement ou de liquidation judiciaire du porteur. Le tireur doit immédiatement confirmer son opposition par écrit, quel que soit le support de cet écrit et appuyer cette opposition par tout document utile».
Ceci étant, faites dans un premier temps votre opposition par téléphone, retenez le nom de la personne qui a reçu votre opposition, la date et l’heure, et faites suivre la communication par un écrit contre un accusé de réception, en rappelant même le nom de cette personne, avant de procéder à la déclaration auprès de la police, car il est important d’arrêter tout de suite et d’abord l’hémorragie de circulation de vos chèques, et vous protéger éventuellement contre des poursuites pénales éventuelles.
La Vie éco
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