samedi 10 décembre 2011

Conservation foncière : les règles changent

La nouvelle loi impose des délais de décision limités pour les conservateurs. La procédure d’opposition a été durcie et les oppositions abusives pénalisées. Des zones à immatriculation obligatoire seront définies pour accroître la superficie de terrains immatriculés.

L’enregistrement du foncier, véritable casse-tête pour l’investissement et l’immobilier avec ses démarches administratives laborieuses, cessera-t-il enfin d’être une contrainte? Avec l’entrée en vigueur de la loi 14-07 relative à la conservation foncière, l’espoir est permis. Le texte attendu depuis le milieu des années 90 a été publié au Bulletin officiel du 24 novembre dernier. Elaboré à l’initiative de l’Agence nationale de la conservation foncière, du cadastre et de la cartographie (ANCFCC), il introduit une réforme d’envergure du système de conservation foncière régi jusque-là par un dahir datant de 1913, et dont la dernière modification remonte à 1954. Comme martelé par l’ANFCC tout au long de la gestation de cette réforme, l’objectif recherché en priorité est de simplifier et de parfaire au maximum les procédures se rapportant au régime d’immatriculation, jugées trop compliquées autant par les professionnels que par les employés de l’agence eux-mêmes. Mais d’abord, la loi 14-07 s’attarde à apporter une précision non dénuée d’intérêt, à savoir qu’elle définit précisément la conservation foncière et ses implications alors que le dahir de 1913 n’en donnait qu’une définition sommaire. En outre, le nouveau texte prévoit une adéquation entre le découpage administratif du Royaume et les juridictions de chaque antenne régionale ou provinciale de l’ANCFCC, comme stipulé dans son article 9. Il est également prévu la création de plusieurs conservations au sein de la juridiction d’une seule préfecture ou province.

Immatriculation obligatoire des terrains dans l’axe Casa-Rabat

Pour en arriver à la simplification des procédures, le nouveau texte supprime les certificats d’affichage et les remplace par des accusés de réception. Aussi, il fixe des délais qui s’imposent à tous les intervenants dans les procédures d’immatriculation pour la réalisation de celle-ci. Les délais d’immatriculation qui peuvent aller jusqu’à 2 ans actuellement pourraient être sensiblement réduits pour ne pas dépasser une année. Pour y arriver, la direction générale de la conservation foncière joue sur le raccourcissement du circuit. A cette fin, la nouvelle loi prévoit que des huissiers soient placés dans chacune des agences de la conservation foncière que compte le Royaume. Ces huissiers sont chargés de tous les rapports de la conservation foncière avec les collectivités locales et le ministère de la justice. Et ils devraient veiller notamment au respect des délais imposés par la loi (voir encadré).

Le second grand apport de cette nouvelle loi concerne la procédure d’opposition. Celle-ci consiste en la contestation par une tierce personne de la légalité d’une démarche d’immatriculation. Le nouveau texte durcit les conditions de cette procédure et pénalise les oppositions abusives.

De fait, en cas d’opposition non justifiée, une amende d’au moins 10% de la valeur vénale du bien doit être payée au profit de l’ANCFCC. En outre, avec l’entrée en vigueur de la loi 14-07, l’opposition ne peut se faire que dans un délai de deux mois à partir de la publication de l’avis d’immatriculation (art. 24). La loi octroie par ailleurs au conservateur la possibilité d’éclater le titre d’une propriété immobilière sujette à opposition si cette dernière ne concerne qu’une partie du bien, l’objectif étant de réserver le droit de jouissance du propriétaire sur la partie du bien non contestée.

Sur un autre registre, la loi 14-07 apporte une nouveauté consistant en l’ouverture de secteurs à immatriculation obligatoire. L’idée est d’imposer, dans la limite d’une zone géographique qui sera déterminée ultérieurement, l’obligation pour les propriétaires d’immatriculer leurs biens immobiliers, et ce, afin d’étendre les terrains immatriculés dont la part demeure aujourd’hui très faible selon les services de l’ANFCC. Pour ces terrains devant obligatoirement être immatriculés, la procédure d’immatriculation est gratuite afin de ne pas rebuter les citoyens se trouvant dans l’obligation d’avoir leur titre foncier. Et il est attendu que l’immatriculation obligatoire concerne dans un premier temps l’axe Casablanca- Rabat.

En somme, les nouveautés introduites par le nouveau texte sont nombreuses et pour les porter à la connaissance du public, l’ANFCC envisage de lancer dans les prochains jours une campagne de communication via de multiples supports média.

Délais : Deux ans en moyenne pour immatriculer un terrain !

Immatriculer un terrain au Maroc n’est pas une sinécure. Selon les professionnels et les services de l’Agence nationale de la conservation foncière du cadastre et de la cartographie (Anfcc), cela prend actuellement une moyenne de deux ans. La faute est aux délais des procédures intermédiaires qui dépassent les limites réglementaires. Mais cela devrait changer avec la promulgation de la nouvelle loi sur la conservation foncière.

Par exemple, l’ancienne loi de 1913 obligeait les conservateurs à attendre une correspondance de la part de l’autorité locale de la région concernée, qui atteste que la réquisition a bien été affichée, avant de commencer la procédure d’immatriculation. Cette correspondance doit intervenir dans un délai de deux mois. Mais en pratique, elle n’est reçue que 3 ou 4 mois plus tard.

Autre insuffisance de la situation actuelle?: les oppositions. «Dans le cas où elles ne sont pas justifiées, celles-ci retardent la procédure d’immatriculation en la bloquant parfois pour des années. Or, dans plusieurs cas de figures, des tiers, sans pièces juridiques probantes, provoquent un retard de procédure qui ne manque pas de léser le propriétaire du bien à immatriculer», fait savoir un professionnel. Là aussi, la situation devrait changer avec la nouvelle loi.

La Vie éco

jeudi 1 décembre 2011

La loi (n° 14-07 ) sur l’immatriculation foncière :

Simplification des procédures

Dans l’objectif d’assurer la célérité et la simplification des procédures, et de renforcer les garanties pour préserver les droits de toutes les parties, le dahir n° 1-11-177 du 25 hija 1432 (22 novembre2011) portant promulgation de la loi n° 14-07 modifiant et complétant le dahir du 9 ramadan 1331 (12 août 1913) sur l’immatriculation foncière, vient de voir le jour après sa publication au Bulletin officiel du 15 décembre 2011 (n°6004) de l’édition française et au bulletin officiel n°5998 du 24 novembre 2011 de l’édition générale en langue arabe, ci-après les détails de la nouvelle loi :

Les articles concernés par les amendements : 1,6,8,9,10,13,16,18,19,20,21,22,23,24,25,26,,27,31,34,35,38,40,41,42,43,,44,48,50,51,52,52 bis,54,55,60,61,62,63,65,66,67,68,69,72,74,75,76,77,78,84,85,88,89,90,91,93,94,97,101,102,103,104,105, et l’article 107

Les articles abrogés et remplacés par des nouveaux articles :

7,11,14,15,17,25,29,30,32,37,45,47,58,64,65bis,70,71,73,82,83,86,87,95,96,100,106,108 et 109

Les articles abrogés :

2,3,4,5,28,36,46,49,53,56,57,59,79,80,81,92,98 et 99

Le concept d’immatriculation (Petite Comparaison) :

Le nouveau texte de loi  comporte  pour la première fois une définition du concept d’immatriculation ; à noter que l’ancienne texte  énonçait  L’immatriculation des immeubles a lieu conformément aux règles posées par le Dahir du 9 Ramadan 1331 (12 août 1913), en suite d’une procédure tendant à  révéler tous droits réels ou charges foncières déjà constitués.

Dans la nouvelle loi, cet article a été réécris et complété pour expliquer en détails l’opération d’immatriculation d’immeubles qui consiste, selon les mots utilisés par la nouvelle loi, à immatriculer un immeuble suite à une procédure de purge, donnant lieu à l’établissement d’un titre foncier qui annule tous titres et purge tous droits antérieurs qui n’y seraient pas mentionnés, inscrire sur le titre foncier établi tout acte et fait portant constitution, transmission, modification, reconnaissance ou extinction de droits réels ou charges foncières relatifs à l’immeuble qui en fait l’objet.

La procédure d’immatriculation :

Selon l’article 10, la réquisition d’immatriculation ne peut être déposée que parles personnes suivantes :

-Le propriétaire

– Le copropriétaire, sous réserve du droit de  choufâa de ses copropriétaires, lorsque ceux-ci se trouvent dans les conditions requises pour l’exercice de ce droit ;

– Le bénéficiaire de droits réels (usufruit, superficie, emphytéose, zina, houa et surélévation, habous)

-Le bénéficiaire de servitudes foncières avec le consentement du propriétaire.

Pour le cas du représentant légal d’un incapable ou d’un mineur a qualité pour déposer une réquisition d’immatriculation en leur noms, au cas où ceux-ci sont détenteurs de droits qui leur permettraient de la déposer eux-mêmes, s’ils n’étaient pas incapables ou mineurs ( art 12).

Les formalités d’immatriculation :

Le requérant d’immatriculation remet au conservateur de la propriété foncière qui en relève récépissé immédiatement,  une réquisition, signée de lui-même ou d’un mandataire muni d’une procuration régulière, qui doit contenir :

1)      Son prénom et son nom, sa qualité et son domicile, son état civil, sa nationalité et, s’il y a  lieu, le nom de l’époux et l’indication du régime matrimonial ou tout accord conclu conformément à l’article 49 du code de la famille et, en cas d’indivision, les mêmes indications que les précédents pour chaque co-indivisaire, avec mention de la part de chacun d’eux. Dans le cas où  le requérant d’immatriculation est une personne morale, mentionner sa dénomination, sa forme juridique, son siège social ainsi que le nom de son représentant légal.

Selon l’article 18, deux exemplaires des pièces visées  à l’article 17 de la loi 14-07 sont adressés par le conservateur de la propriété foncière contre accusé de réception, 20 jours avant la date  fixée  pour le bornage, au président du tribunal de première instance, au représentant de l’autorité locale et au président du conseil communal, du territoire sur lequel se trouve l’immeuble concerné, ceux-ci les font obligatoirement affichés dans leurs locaux et maintiennent ainsi exposés au public jusqu’au jour fixé pour le bornage.

Le représentant de l’autorité locale fait en outre publier l’extrait et l’avis avec la date et l’heure du bornage sur les marché de son territoire, jusqu’au jour du bornage.

Les oppositions :

Selon l’article 24 relatif au bornage, toute personne qui prétend à un droit sur un immeuble en cours d’immatriculation, peut si elle ne l’a déjà fait antérieurement, intervenir en la procédure, par opposition, et ce pendant un délai de 2 mois qui court de la publication au bulletin officiel.

Pour les oppositions formulées au nom des tiers doit justifier de son identité, lorsqu’elle agit en qualité de tuteur, de représentant légal ou de mandataire, justifier de cette qualité par la production de pièces régulières, fournir les indications prévues à l’article 25 de la nouvelle loi et verser les actes de succession lorsqu’il agit de cohéritiers.

Aucune opposition n’est recevable, sauf l’exception prévue par l’article 29, après l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la date de publication au bulletin officiel de l’avis mentionné dans l’article 23 de la nouvelle loi.

Les inscriptions :

Toute personne demandant une inscription, mention ou prénotation sur le titre foncier, doit déposer auprès du conservateur de la propriété foncière une réquisition datée et signée par ses soins ou par le conservateur dans le cas où elle ne saurait ou ne pourrait signer.

Cette réquisition doit contenir et préciser les éléments mentionnés dans l’article 69

L’inscription des droits des mineurs et des incapables est faite à la requête de leurs représentants légaux, de leurs tuteurs et, à défaut, à la requête du juge chargé des tutelles ou du procureur du roi.

Les radiations :

Les inscriptions, mention et prénotations faites sur le titre foncier peuvent être rayées en vertu de tout acte ou tout jugement passé en force de chose jugée constatant, au regard des personnes intéressées, la non existence ou l’extinction du droit auquel elles se rapportent.

La partie qui veut opérer une radiation doit déposer auprès du conservateur de la propriété foncière une réquisition datée et signée d’elle-même ou du conservateur dans le cas où elle ne saurait ou pourrait signer, contenant et précisant les éléments de l’article 93.

La délivrance du duplicata du titre foncier et certificat spécial d’inscription :

En cas de perte de vol ou de destruction du duplicata du titre foncier ou d’un certificat spécial d’inscription, le titulaire doit présenter au conservateur de la propriété foncière les pièces justificatives et faire une déclaration contenant son identité, les circonstances de la perte ,du vol ou de la destruction et tous les renseignements qu’il possède de l’affaire. (art 101 al. 1) Le conservateur peut si la déclaration lui parait sincère, délivrer à l’intéressé un nouveau duplicata ou de la copie du certificat spécial d’inscription, en indiquant la date et les circonstances de la délivrance.

En cas d’opposition à la délivrance du nouveau duplicata du titre foncier ou de la copie du certificat spécial d’inscription ou si le conservateur de la propriété foncière estime qu’il n’a pas à donner suite à la demande qui lui en est faite, il appartient au requérant de se pourvoir devant le tribunal de première instance qui statue dans les formes prescrites par le code de procédure civile.

Les pénalités :

Selon l’article 104, les dispositions du code pénal sont applicables dans plusieurs cas comme celui qui a sciemment et dans le but de procurer à une personne un gain illégitime, a falsifié, contrefait ou altéré les titres fonciers, duplicata, état ou certificats délivrés par le conservateur de la propriété foncière.

Immatriculation foncière obligatoire ou facultative?

Dans la nouvelle version de l’article 6, le législateur déclare que l’immatriculation est facultative. Toutefois lorsqu’une réquisition d’immatriculation a été déposée, elle ne peut être retirée.

L’immatriculation est obligatoire quant elle est ordonnée par les tribunaux compétents au cours  d’une procédure de saisie immobilière à l’encontre du saisi (art 8)

A noter enfin que la nouvelle loi a soumis les immeubles sis dans les zones d’immatriculation obligatoire aux dispositions de la section VI  de loi et aux autres dispositions non contraires à la loi.

L’arrêté ouvrant et délimitant la zone d’immatriculation obligatoire doit être publiée au bulletin officiel et affiché dans les locaux de l’autorité locale, de la commune, du tribunal de première instance et de la conservation foncière.

La commission d’immatriculation obligatoire :

La nouvelle loi a prévu dans son article 51-3 la mise en pace d’une commission d’immatriculation obligatoire qui doit être composée du :

-Représentant de l’autorité locale, président

-Président de la commune concernée ou son représentant

–  Conservateur de la propriété foncière concerné ou son représentant

– Chef du service du cadastre concerné ou son représentant

Lesdits membres sont nommés par arrêté du gouverneur lorsque la zone d’immatriculation obligatoire chevauche sur plus d’une préfecture ou province, ils sont nommés par arrêté conjoint des gouverneurs concernés.