vendredi 15 novembre 2019

Recours à la visioconférence lors des assemblées de société anonyme

Les sociétés anonymes peuvent prévoir dans leurs statuts la possibilité de tenir des assemblées générales d’actionnaires, ordinaires et extraordinaires, par visioconférence ou par des moyens de télécommunication et ce, conformément avec les dispositions de la loi n° 20-05 qui complète la loi n° 17-95, mais avez-vous songé à tous les aspects juridiques de l’utilisation de cette technologie ?
L’intégration des technologies dans le milieu juridique telles que la signature électronique, la visioconférence ne sont pas sans contrainte, car il faudrait être conscient de tous les aspects juridiques liés à ces technologies.
Techniquement, les réunions de la société anonyme (SA) pourrait être tenues par la visioconférence via une multitude d’applications offertes pour ne citer que Teams, Skype, FaceTime, Whatsapp, Telegram, Viber etc…
Toutefois, il y a lieu de noter que ce n’est pas tous ces moyens de visioconférence remplissent les conditions juridiques contenues dans la loi n°20-05. Alors qu’elles sont ces conditions
Le législateur marocain a consacré tout un dispositif (1) sur les délibérations des assemblées générales et au sein des conseils de délibérations des sociétés anonymes dans la loi n° 20-05 qui a modifié et complété la loi n° 17-95 relative aux sociétés anonymes.
L’article 50 bis dispose qu’il est désigné par moyens de visioconférence ou moyens équivalents tous moyens permettant aux administrateurs, membres du conseil de surveillance ou actionnaires de la société de participer à distance aux réunions de ses organes de direction ou de ses organes sociaux.
  • Les moyens de visioconférence utilisés doivent remplir les conditions suivantes :
– Satisfaire à des caractéristiques techniques garantissant une participation effective aux réunions des organes de direction ou des organes sociaux dont les délibérations sont retransmises de façon continue.
– Permettre d’identifier préalablement les personnes participant par ce moyen à la réunion;
– Permettre un enregistrement fiable des discussions et délibérations, pour les moyens de preuve »
De tout ce qui précèdent, on comprend que la visioconférence est considérée comme étant une téléconférence permettant, en plus de la transmission de la parole et de documents, la transmission d’images vidéos des participants éloignés.
Par conséquent, nous pensons que parmi toutes ces applications citées en haut, seule l’application Teams et Skype, qui répondent aux conditions juridiques et techniques citées par l’article 50 bis, d’où l’importance de s’assurer que les outils et moyens de visioconférence, adoptés par l’organe de décision d’une SA, ne viendraient pas invalider les délibérations de ses réunions.
  • Quid de la protection des données personnelles ?
L’utilisation des outils de visioconférence posent la question de l’application de la loi n° 09-08 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel.(2)
  • Collecte et traitement de données :
Tout traitement de données personnelles collectées par une société anonyme lors d’une assemblée générale par les moyens de visioconférence doit faire l’objet d’une déclaration préalable auprès de la CNDP, ou d’une autorisation préalable de la CNDP lorsque les traitements portent sur certaines données limitativement énumérées par la loi telles que le numéro de la CIN et des données sensibles.
Les données concernées sont toute information, de quelque nature qu’elle soit et indépendamment de son support, y compris le son et l’image, concernant une personne physique identifiée ou identifiable.
Les conditions et modalités de collecte des données :
La personne physique doit donner son consentement d’une façon claire, incontestable, libre et avertie à la collecte et à tout traitement de ses données.
La loi interdit l’utilisation des coordonnées d’une personne qui n’a pas exprimé un consentement préalable.
Seules les données pertinentes et non excessives doivent être collectées et seulement pour des finalités déterminées et légitimes.
Les données collectées doivent être traitées conformément à ces finalités et conservées pendant une durée n’excédant pas celle nécessaire à la réalisation des finalités pour lesquelles elles ont été collectées.
Bon à savoir : Lorsque l’AG est tenue par visioconférence, il faudrait tenir compte de :
  • La feuille de présence :
Lorsque l’assemblée se tient par visioconférence ou par un moyen de télécommunication, l’émargement de la feuille de présence par les actionnaires n’est pas requis.
  • Le Procès-verbal de l’AG :
Le procès-verbal des délibérations de l’assemblée doit mentionner qu’elle s’est tenue par recours à la visioconférence ou à des moyens de télécommunication. Il peut être signé par signature électronique au moyen d’un procédé fiable d’identification de chacun des membres du bureau de l’assemblée.
  • Et si un incident technique arrive lors de la visioconférence de l’AG .. ?
Les procès-verbaux des réunions d’assemblées générales et au sein des conseils de délibérations des SA doivent faire état de tout incident technique relatif à la visioconférence lorsque la réunion est perturbé par une mauvaise connexion internet ou tout autre incident.
  • La convocation à l’assemblée générale :
La convocation à l’assemblée générale doit être établie selon la forme et les conditions de l’article 122 de la loi n°17-95
Elle doit aussi tenir compte de l’heure de la tenue de l’assemblée. En pratique, les actionnaires et/ou leurs mandataires peuvent assister à l’AG soit physiquement ou virtuellement. (Lorsque les statuts de la SA le prévoit). Donc, il se peut également que juste un actionnaire ou deux qui participe par visioconférence et à partir d’un pays étranger dont l’heure locale est décalée par une heure ou plusieurs heures, la convocation devra ainsi préciser que l’heure considérée est l’heure locale afin d’éviter les ambiguïtés ou éventuellement les contestations de la part des actionnaires qui se retrouvent hors du pays.
(1) Voir les articles 50 modifié, le nouvel article 50 bis et l’article 110 modifié
(2) Promulguée par le dahir n° 1-09-15 du 22 safar 1430 ( 18 février 2009 ),
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Peut-on me refuser l’ouverture d’un compte bancaire ?

Vous vous êtes présenté à une agence bancaire afin de demander l’ouverture d’un compte, mais surprise, on vous refuse votre demande !
Le droit au compte bancaire est prévu par l’article 150 de la loi n° 10312 relative aux établissements de crédit et organismes assimilés, qui prévoit que : « Toute personne ne disposant pas d’un compte à vue et qui s’est vu refuser, par une ou plusieurs banques, l’ouverture d’un tel compte après l’avoir demandé par lettre recommandé avec accusé de réception, peut demander à Bank Al-Maghrib de désigner  une banque auprès de laquelle elle peut se faire ouvrir un compte. La banque en question peut limiter les services liés à l’ouverture du compte aux opérations de caisse seulement… ».
Toutefois, il y a lieu de signaler que le droit au compte est lié à la liberté du client et aussi à la liberté de la banque.
L’ouverture d’un compte est le résultat d’un accord préalable entre le banquier et le client.
Avant d’ouvrir un compte bancaire pour son client, le banquier doit identifier son client. Cette identification qui est préalable à toute ouverture d’un compte est prévue à l’article 488 du code de commerce qui dispose :
« L’établissement bancaire doit préalablement à l’ouverture d’un compte vérifier :

– En ce qui concerne les personnes physiques, le domicile  et l’identité du postulant au vu des énonciations de sa carte d’identité nationale, de la carte d’immatriculation pour les étrangers résidents ou du passeport ou toute autre pièce d’identité en tenant lieu pour les étrangers non résidents ;

– En ce qui concerne les personnes morales, la forme et la dénomination, l’adresse du siège, l’identité et les pouvoirs de la ou des personnes physiques habilitées à effectuer des opérations sur le compte ainsi que le numéro d’inscription à l’impôt sur les sociétés, au registre du commerce ou à l’impôt des patentes.

Les caractéristiques et les références des documents présentés sont enregistrées par l’établissement »
Par conséquent, il s’agit de vérifier l’identité du client à partir d’ « un document officiel » comme sa CIN, cette vérification permet d’éviter que « le titulaire du compte effectue des opérations illicites sous un nom d’emprunt ». En effet, la loi n° 43-05 relative à la lutte contre le blanchiment impose la vérification à travers une obligation de vigilance dans son article 3 qui dispose :
« Les personnes assujetties sont tenues de recueillir tous les éléments permettant l’identification de leur clientèle habituelle ou occasionnelle.
Lorsque le client est une personne morale, les personnes assujetties doivent vérifier au moyen de documents (comme le modèle J, copie des Statuts, Pv etc…) et indications nécessaires, toutes les informations concernant sa dénomination, sa forme juridique, son activité, l’adresse du siège social, son capital, l’identité de ses dirigeants et les pouvoirs des personnes habilitées à le représenter vis-à-vis des tiers ou à agir en son nom en vertu d’un mandat »
  • Vérifier l’adresse du client :
Il s’agit d’obtenir une adresse à laquelle la banque peut joindre son client.
Cette vérification permet de confirmer l’identité du client, de s’assurer que le document officiel n’est pas falsifié.
Ainsi, pour s’assurer de la crédibilité des informations, la banque peut exiger la dernière facture de téléphone ou la facture d’eau et d’électricité par exemple
  • Vérifier la capacité juridique du client :
La banque doit s’assurer également de la capacité juridique du demandeur, afin de s’assurer que le titulaire du compte est habilité à effectuer les opérations au compte. Il est à souligner que la loi définit les cas d’incapacité (mineurs, l’incapable majeure).
De tout ce qui précède, la banque peut accepter ou refuser l’ouverture d’un compte sans obligation de motiver sa décision ou de la justifier.
Dans l’hypothèque d’un refus, le client, peut conformément à l’article 150 de la loi n° 103-12, saisir Bank  Al Maghrib qui va désigner une banque qui ne peut pas refuser d’ouvrir le compte
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Ces services bancaires doivent être assurés à titre gratuit :

Savez-vous que votre droit au compte (1) bancaire inclut la gratuité de certains services bancaires ?
Savez-vous que cette gratuité ne peut être conditionnée ni par le nombre d’opérations effectuées par le titulaire du compte ou son mandataire ni par l’exigence d’un solde minimum ?
En plus, cette gratuité trouve sa base juridique dans la directive du gouverneur de Bank Al-Maghrib n°1/G/2010 du 3 Mai 2010 relative aux services bancaires minimum devant être offerts par les banques à leur clientèle à titre gratuit.
Cette directive est dressée par une règle d’ordre public, ce qui rend ses dispositions opposables aux banques.
Voici donc, la liste complète des services bancaires susceptibles d’être offerts par les banques à leur clientèle, à titre gratuit :
1. Ouverture de comptes ;
2. Délivrance de chéquier ;
3. Délivrance du livret d’épargne ;
4. Domiciliation de salaire ;
5. Demande d’attestation du relevé d’identité bancaire ;
6. Versement en espèces, hors acquittement du montant du timbre fiscal ;
7. Retrait d’espèces auprès du guichet détenteur du compte à débiter, à l’exclusion des retraits par
‘Chèque Guichet’ pour les clients détenteurs d’un chéquier ;
8. Retrait d’espèces sur présentation d’un carnet d’épargne au guichet détenteur du compte à débiter ;
9. Retrait auprès des guichets automatiques bancaires de l’établissement détenteur du compte ;
10. Émission de virement de compte à compte, entre particuliers, au sein de la même banque ;
11. Réception de virements nationaux ;
12. Réception de mises à disposition nationales, au sein du même établissement ;
13. Établissement et envoi du relevé de compte au client ;
14. Consultation et édition du solde et de l’historique du compte à travers le guichet automatique bancaire et/ou internet, hors frais de souscription à ces canaux de distribution ;
15. Changement des éléments d’identification du titulaire du compte ;
(1) Le droit au compte bancaire est prévu par l’article 150 de la loi bancaire portant n° 103-12 qui prévoit que : « Toute personne ne disposant pas d’un compte à vue et qui s’est vu refuser, par une ou plusieurs banques, l’ouverture d’un tel compte après l’avoir demandé par lettre recommandé avec accusé de réception, peut demander à Bank Al-Maghrib de désigner  une banque auprès de laquelle elle peut se faire ouvrir un compte. La banque en question peut limiter les services liés à l’ouverture du compte aux opérations de caisse seulement… ». Nous développerons ce droit dans un prochain billet pour plus de précision.
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Nantissement de compte bancaire selon la nouvelle loi n° 21-18

Ce billet s’inscrit dans le cadre de la nouvelle loi n° 21-18 sur les sûretés mobilières, publiée au bulletin officiel du 22 avril 2019 (n° 6771 édition arabe)

  • Qu’est-ce que le nantissement de compte bancaire ?

Selon l’article 1221 et 1222, le nantissement de compte bancaire est un nantissement de créances.

Lorsque ce nantissement porte sur un compte bancaire, la créance nantie s’entend du solde créditeur de ce compte à chaque date à laquelle le nantissement est réalisé.

  • L’acte constitutif :

La description dans l’acte constitutif du compte nanti (selon l’article 1223) s’effectue par l’indication du titulaire du compte nanti, de la banque teneuse du compte nanti et de toute information permettant d’identifier le compte nanti, telles que, lorsqu’il est ouvert, les références du compte nanti.

  • La notification et la publication au registre national de nantissement de l’acte constitutif :

Pour être opposable à la banque teneuse du compte, le nantissement de compte bancaire doit lui être notifié par le constituant ou cette dernière doit intervenir à l’acte, à moins que la banque teneuse du compte et le créancier nanti ne soient la même personne.

Selon l’article 392.8 du Code de Commerce, il n’est pas suffisant de se contenter seul de la notification du nantissement du compte bancaire, mais il est également nécessaire de procéder à une inscription portant sur le nantissement du compte bancaire au registre national éléctronique des sùretés mobilère (*).

Exemple :

Si un compte est tenu chez SGMB, son nantissement en faveur de BMCE ne sera opposable devant SGMB par la simple inscription au registre national de nantissement, car il est impératif que l’acte constitutif soit notifié à la banque teneuse, soit dans notre exemple SGMB

Cette procédure existe dans plusieurs législations dans les quatre coins du monde, parfois l’opposabilité se fait uniquement par la signification / notification sans la publication aux registres publics. Cependant, la loi n° 21-18 exige la publication et la notification de l’acte constitutif.

  • Le constituant peut-il utiliser le compte nanti ?

Selon l’article 1224, le compte nanti pourrait être utilisé librement par le constituant. Le débit de toutes les sommes figurant au crédit du compte nanti n’éteint pas le nantissement. Toutefois, selon l’article 1225, le créancier nanti peut, si l’acte constitutif le prévoit, notifier à la banque teneuse du compte nanti, avec copie au constituant, le blocage du compte nanti. Ainsi, à compter de la notification de blocage, il devient interdit, sous réserve de la régularisation des opérations en cours, tout mouvement du compte nanti dans le sens du débit à l’exception des débits en faveur du créancier nanti, sans pour autant entraîner la clôture du compte nanti. Le blocage du compte nanti prend fin à la date à laquelle le créancier nanti adresse à la banque teneuse du compte nanti, avec copie au constituant, une notification de fin de blocage.

  • Quid du défaut de paiement de la créance garantie !

En cas de défaut de paiement de la créance garantie et 8 jours ouvrables après une mise en demeure restée sans effet, le créancier nanti peut, dans la limite des sommes impayées au titre de la créance garantie et sans préjudice de l’article 1207, réclamer à la banque teneuse de compte le versement de tout ou partie des fonds figurant au crédit du compte bancaire nanti.

Notons enfin, que le nantissement de compte bancaire subsiste tant que la créance garantie n’a pas été intégralement payée.

(*) Le registre national des nantissements devrait être prêt pour le début de l’année 2020. La mission principale de ce registre est d’informer les autres créanciers sur les inscriptions faites sur le bien mobilier donné en garantie et de fixer le rang des bénéficiaires d’un droit sur ledit bien.

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Le calcul des intérêts bancaire au Maroc

  • Pour les banques toutes les années comportent 360 jours ;

Selon l’article 496 du code de commerce, le relevé de compte indique de façon apparente le taux des intérêts et des commissions, leur montant, et le mode de calcul.

On constate de la lecture des dispositions de l’article 496 que le relevé de compte doit indiquer le mode de calcul, sachant qu’on ne peut trouver aucune autre disposition dans le code de commerce sur le calcul des intérêts bancaires. Alors comment ces derniers sont calculés ?

Pour répondre à notre question, il faudrait de revenir aux sources du droit bancaire, et le rôle de l’usage bancaire dans la pratique bancaire.

En droit bancaire, les usages sont nombreux et peuvent régir aussi bien les rapports entre établissement de crédit que les rapports de ces derniers avec leur clientèle. Les usages s’appliquent sans aucune restriction.

En application de l’usage bancaire, une année ne compte que 360 jours. Il s’agit en réalité d’une technique, utilisée depuis des années par l’ensemble des banques du royaume parce qu’elle facilite le calcul des intérêts bancaires.

Malheureusement, cette technique fait augmenter les taux d’intérêts à 1.666 % ou 1.338 % pour les clients, selon s’il s’agit d’une année bissextile ou sextile.

Des voix partisanes, ont réclamé dans la passé, un amendement de l’article 496 dans un objectif d’annuler l’usage bancaire quant au calcul des intérêts et pour ne considérer que l’année civile dans le calcul des intérêts bancaires, laquelle comporte 365 ou 366 jours.

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Clôture de comptes bancaires : La loi n°134-12 au B.O Cliquez-ici
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